Leurre Pâleurs - En séance - 2

"Mes amis, depuis quelques semaines, la quiétude de notre quartier est menacée. Certes, on croise ça et là de pleines charretées de badauds le nez au vent, qui vont musant en ville, et encombrent le pavé. Mais il y a pis : ces chasseurs de cafards surgis si soudainement, qu'à peu je pense qu'ils déversent eux-mêmes les répugnants insectes qu'ils prétendent combattre.
Toute la noise de cette armée de fâcheux n'est pas sans perturber grièvement notre mode de vie."

"Clea, Techet, chacun l'aura pu constater, ces troubles tissent leur toile depuis le jour que notre jeune ami est devenu, bien malgré lui, le point de mire du nauséabond article de cette revue de scandales. C'est là le point. J'opine qu'il faut que cessent ces nuisances. Leur étoffe est trop rêche pour que notre quartier ait profit à s'en revêtir, et nous sommes céans pour en démailler la trame. Que chacun parle, sans fard et sans crainte ! Arimond, veuille commencer."

"La merci à toi, Melric ! Compagnons, ainsi que je vous le dis naguère, de prime j'augurais que les affaires et le commerce ne pouvaient qu'aller en s'épanouissant, tant le renom de notre quartier de jour en jour mûrissait. Mais... Souvenez-vous du lopin, sis avenue Ksimkapoo, que je convoitais d'acquérir : mon avant-garde, en distribuant savamment clicailles et pots-de-vin, avait jà circonvenu la place-forte plus qu'à demi...

... je m'apensais qu'un ultime assaut emporterait la victoire, quand, bien le rebours, je fus pris de vitesse par une cohorte d'investisseurs de Rivazur ! La peste soit de ces fieffés faquins ! Si vous m'en croyez, boutons ces gens hors du quartier ! Richesse bien ordonnée commence par soi-même !"

On dirait qu'Arimond, il parle toujours de simflouz ! Moi, je n'en ai presque pas... mais à quoi servent tous les simflouz du monde sans le sourire de... Non, il faut que j'arrête de penser à elle !

"Arimond, nous t'avons entendu. Au-delà de ceux de nos concitoyens qui portent l'aspiration Fortune, les simflouz contribuent à l'accomplissement de nombre de nos désirs, et nous nous devons de nous en préoccuper. Dame Sénège ?"

"Des cafards à présent ! Non, vraiment, c'est plus que je ne peux souffrir ! Jamais jusqu'ici ces horreurs n'avaient été vues dans le quartier. L'hygiène, compagnons ! L'hygiène est l'un de nos besoins majeurs ! On ne le répétera jamais assez ! Alors il faut que ces gens partent ! Tout de suite ! Loin ! Et qu'ils emportent leurs déchets avec eux !"

"Clea... Clea, tu te souviens de l'histoire que tu m'as racontée, celle du joueur de flûte ? Quand il joue, tous les rats de la ville le suivent et vont se noyer ? Peut-être qu'en demandant à Frof de chanter, les cafards le suivraient ?"
"Hi hi ! Chut ! Techet, pas maintenant, je t'expliquerai !"

"Dame Sénège, toi qui veilles sur les Huit-Besoins, nous t'avons entendue. Toi, Heek, qu'opines-tu ?"

"Compagnons, je balance en mon for. Toujours ai-je mis en avant la tradition : notre quartier est tel un mets raffiné, chaque nouveau Sim que nous y accueillons est un ingrédient unique, une épice rare, qui en souligne la saveur. S'il ne se fond dans l'harmonie de l'ensemble, l'ingrédient de lui-même surnage et il est aisé de l'en écarter. ll me déplairait que nous dussions plonger la cuiller au fond du pot, de crainte de gâter tout le mets."

Là, j'avoue que son histoire de cuiller et de pot, je n'ai pas bien compris. Clea non plus, je crois. Mais Heek a continué.

"Parmi tous ces badauds, il est certes nombre de fâcheux. J'espérais que la première ondée suffît à éteindre les braises de leur engouement, mais il le faut reconnaître, chaque jour agit comme un soufflet qui en attise les flammes. Alors, oui, si nous voulons préserver la terre de nos pères, et notre mode de vie, il nous faudra étouffer ce feu."

"Alors, vous aussi, Heek ! Voilà comme vous y allez ! J'entends bien que, même au sens figuré, c'est Techet que vous vous proposez d'étouffer ! Viens, mon garçon, c'est assez, rentrons chez nous."

"Paix-là, Clea ! Et assois-toi. C'est moi, Melric, qui t'en prie, au nom de tous les habitants du quartier, et du respect que tu dois à ce Conseil. Sache que tu pourras parler ! Mais quand ton tour sera venu. Heek, tu as parlé au nom des Relations à long terme. Lo Dio ?"

"Hier, ce canyon était isolé, inconnu, paisible.
Aujourd'hui, déjà, nos fils ne parlent plus notre langue.
Demain, si nous n'y prenons garde, nous disparaîtrons.
Telle est la leçon que les siècles ont enseigné à mon peuple."

Brrr ! Lo Dio, quand il se tait, déjà il me fait peur, mais quand il parle, c'est encore pire, ma sève se fige !

"Lo Dio, nous t'avons entendu, au nom des Souvenirs. Clea, à présent, nous t'écoutons. Parle ainsi que nous le fîmes, sans fard et sans crainte."

"Je... Moi aussi, je tiens à ce quartier. Je ne suis pas sûre de... Mais, avec tout le respect que je vous dois, à vous les Conseillers de Tidsid, et à votre sagesse, je vous préviens ! Le premier qui touche à un cheveu de Techet, je le..."

"Clea, Clea, nous connaissons ta fougue ! Mais regarde le crâne de ton garçon : où sont ces cheveux dont tu parles ? Nul n'y pourrait toucher !
Plus sérieusement, tous ici nous sommes vos amis. Techet vit ici, il est l'un d'entre nous, et c'est ensemble que nous ne laisserons pas de trouver une solution."

"Quiconque parmi nous eût voulu attenter de chasser Techet de Tidsid, eût eu beau jeu d'aviser les autorités de Sim City. Crois-tu, Clea, que les services sociaux t'eussent laissé élever un garçon, venu de nulle part, que tu n'as mie adopté ? Aussi apaise-toi, et continuons à débattre."

"Nom d'un arbre à simflouz ! Je n'entends rien à ce galimatias ! Melric, à dextre tu annonces que tous ces remuements ont pour cause la présence de Techet, et à senestre tu soutiens que le garçon doit demeurer vivre céans ! Est-ce là toute ta solution ? Pour nous protéger, que diantre ! Chassons ces intrus du canyon, à coups de fourche s'il le faut, et barrons-en les deux accès, ainsi que nos pères eussent agi ! Ah ça ! Décrétons, et brisons là !"

"Recourir à la force armée ? Non, Arimond, non, je décrois que les temps se prêtent encore à ces démonstrations... Il y faut plus de subtilesse..."

"Et si ces touristes étaient en mal de distraction ? Ne serait-ce pas subtil, maître Melric, de leur proposer toutes sortes d'occupations ? Bibliothèques, bancs sportifs, chevalets, que sais-je encore, pour les divertir et leur permettre de travailler leurs compétences ?"

"Je ne suis pas loin, Dame Sénège, de partager tes vues, mais... elles se heurtent au mur de notre décision, car notre quartier ne peut qu'il ne devienne un centre touristique.
J'ai songé que... Oui, Heek, veux-tu parler ?"